Iota

Sans titre

2021

Sous commissariat de Michaël Nicolaï

 

Pour les parkings du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Iota a d’abord réfléchi à peindre une voiture qui se serait transformée en lierre. Puis, elle a abandonné ce premier projet et s’en explique : « J’ai voulu rester dans mon univers où l’humain occupe la place centrale. C’est un travail sur l’intime. J’y rejoins l’idée que, consciemment ou non, beaucoup d’artistes produisent des images d’eux-mêmes, quelque chose qui les représente, qui traduise leurs émotions. Mes peintures parlent ainsi d’états intérieurs, de phases oniriques. Il y a un rapport à l’inconscient. C’est pour cela que mes personnages semblent flotter en suspension ou léviter en apesanteur comme dans un rêve. »

Autre constante du travail de Iota : la présence de la nature. Ici comme ailleurs dans ses peintures, une figure féminine se transforme en végétal. Même si l’artiste n’en parle pas, la tentation de reconnaître des références classiques est forte. Ne fût-ce que parmi les fables qu’Ovide compile dans les Métamorphoses lesquelles ne comptent pas moins de 22 opérations du genre dont la transformation de Cyparisse en cyprès, de Baucis en tilleul, de Philémon en chêne, d’Attis en pin, de Myrrha en myrte, de Leucothoé en arbre à encens, de Syrinx en roseau ou encore celle d’Héliades, de Bacchantes ou de Ménades en plantes indéterminées. Sans aucun doute, la lignification de Daphné reste la plus connue. Le poète polisson nous y raconte que, pour échapper aux assiduités d’Apollon, cette nymphe d’une très grande beauté implora son père, le dieu fleuve Pénée, de la métamorphoser en laurier. Toujours à l’affût d’une bonne histoire, Ovide poursuit en expliquant que cela ne suffit pas à calmer Apollon qui, en embrassant l’arbre, sentit battre le cœur de Daphné puis déclara que le laurier sera son végétal emblématique. En échange, le dieu lui accorda l’immortalité et conféra à ses feuilles une verdeur permanente laquelle croise l’idée de résilience très présente dans l’esprit de Iota qui dit : « Les plantes s’adaptent. Elles semblent surmonter les écueils et représentent pour moi la poursuite de la vie après un choc traumatique. Cette capacité à surmonter les obstacles mène vers la sérénité. Dans le même ordre d’idées, je m’inspire du Kintsugi qui est une technique pratiquée au Japon pour réparer les céramiques brisées au moyen de laques à la poudre d’or : travailler de la sorte, c’est mettre en avant les blessures des choses et les rendre plus belles. »

La peinture du Parlement est en outre très caractéristique de la manière de Iota, de sa palette, de la pose des couleurs en dégradé, de l’attention portée à la texture rendue point par point ou de l’économie de moyens : en quelques traits, elle parvient à rendre un détail ou la présence d’une figure avec un grand réalisme. « Je suis autodidacte, explique l’artiste. Mais je puise beaucoup de références dans la peinture classique, en particulier celle des maîtres de la Renaissance. Mon autre grande source d’inspiration est l’Art Nouveau avec le développement des arabesques et des lignes en coup de fouet. Ici aussi, la présence de la nature est centrale. »

Pierre Henrion

Définition
iota