L'Hôtel du Greffe

L'Hôtel Torrington, rebaptisé Hôtel du Greffe qui accueille les bureaux de la présidence, du secrétariat général et une très large partie des services de l'administration du Parlement.

Bref historique du site

Dans le premier quart du XIVe siècle, le duc de Brabant Jean III acquit les terres voisines de son palais de Bruxelles, situé sur une colline d'où il dominait la ville. Il y fit aménager un vignoble et une garenne, ou warande, qui constituait une réserve à gibier. Le terrain était entouré de murs ou de palissades ouvertes par un portail vers le Treurenberg. Philippe le Bon, puis Charles-Quint améliorèrent l'ensemble de la Cour de Brabant (ancien palais ducal) et de ses jardins.
Le jardin et la warande subirent autant de transformations que l'ancien palais ducal : les archiducs Albert et Isabelle firent venir à Bruxelles, en 1598, l'ingénieur hydraulicien Salomon de Caus pour qu'il organise des jeux d'eau dans les jardins.
L'incendie qui ravagea la Cour de Brabant en 1731 entraîna l'abandon du site et de ses jardins. L'ensemble ruiné prit alors le nom de « cour brûlée ».
On décida d'aménager l'esplanade en place Royale en vue d'honorer le Gouverneur Charles de Loraine : une statue devait lui être érigée dans un cadre urbain de qualité.
En 1774, le gouverneur de Bruxelles proposa d'établir une promenade dans les anciens jardins de la Cour. Le magistrat de la Ville s'engagea à paver les rues qui les bordaient : la rue de Belle-Vue (place des Palais), la rue Royale, la rue Ducale et la rue de Brabant (ancien nom de la rue de la Loi).
L'architecte autrichien Joachim Zinner, jardinier de la Cour, dessina le projet du parc en 1774. Une convention approuvée le 20 juillet 1776 par Marie-Thérèse régit les conditions d'achat et les obligations liées aux acquisitions des terrains autour du parc. Le choix définitif de l'emplacement pour les bâtiments qui devaient abriter le Conseil souverain de Brabant, au centre de la nouvelle rue, marqua le début du lotissement.

Définition

La rue de Brabant (rue de la loi)

L'architecte Barnabé Guimard, ancien élève de Blondel à l'Académie royale d'architecture de Paris, travailla à la place Royale et aux bâtiments autour du parc. Il dressa les plans pour le Palais du Conseil souverain de Brabant.
Deux grands hôtels furent réalisés par des abbayes, Sainte-Gertrude à Louvain et Affligem.
Le front bâti est d'aspect général néo-classique avec une note de régionalisme.
Louis de l'Escaille avait acquis le n° 2.
De l'ensemble des terrains de la rue de Brabant, seules trois parcelles n'avaient pas encore trouvé acquéreur en 1783 : ce sont celles qui portent actuellement les n° 4, 6 (Parlement de la Communauté française) et 8.
On décida alors de construire des façades écran qui furent quasi terminées en 1782.

Il ne restait plus qu'à forcer des acquéreurs. Joseph II, en 1783 par un édit, supprima les ordres contemplatifs. Les abbayes, incertaines du sort qui leur serait réservé, consentirent des efforts financiers pour acquérir les terrains.
L'abbaye bénédictine d'Affligem acheta en 1783 les trois parcelles restantes.
C'est l'architecte Laurent-Benoît Dewez qui fut chargé des travaux.
Des trois immeubles construits à la rue de Brabant par l'abbaye d'Affligem, celui dont la façade est la plus imposante (le 6, rue de la loi, actuellement Parlement de la Communauté française) portait le titre d'Hôtel Torrington, du nom de son premier et prestigieux locataire, ministre plénipotentiaire anglais.

Définition

Hôtel Torrington (6, rue de la Loi)

L'Hôtel Torrington fut transformé intérieurement à maintes reprises, la restauration ou la reconstruction partielle dût encore être adaptée à la nouvelle fonction du bâtiment qui, racheté par l'Etat, devint un ministère en 1816.

Il y eut notamment des dégâts lors des journées de septembre 1830.

L'incendie volontaire qui détruisit le palais de la Nation le 26 septembre 1830, pour en déloger les soldats du roi de Hollande, entraîna de lourds dégâts aux immeubles voisins.

L'Hôtel fut rebâti entre 1833 et 1834.

La distribution intérieure actuelle du rez-de-chaussée, des premier et deuxième étages conserve des éléments importants des projets établis par l'architecte Dewez.

Quand ils devinrent propriété de l'Etat, les bâtiments ayant appartenu à l'abbaye d'Affligem furent confiés à la responsabilité du service des travaux ou du service des ponts et Chaussées, du Ministre des Finances, sous le régime hollandais et du Ministre de l'Intérieur, après l'indépendance. Les administrations n'ont pas conservé les archives de leurs travaux.

L'aspect des façades des anciennes propriétés de l'abbaye d'Affligem n'a cependant pas été modifié. La ville de Bruxelles y veilla.

Définition
Photo Hôtel de Ligne

Hôtel du Greffe - crédit photo Reporters

De l'Hôtel Torrington à l'Hôtel du Greffe

Le Parlement de la Communauté française y installe sa présidence, son greffe et ses services en 1975. Les installations du 6 rue de la Loi ont été rénovées en deux phases. En 1988-89, on a procédé aux aménagements des deuxième et troisième étages. En 1991, les locaux du premier étage ont été restaurés. Une adaptation fonctionnelle du 4 rue de la Loi a également été réalisée.

Les plans originaux de Dewez pour l’Hôtel Torrington permettent d’en reconstituer la distribution originale. Le quadrilatère était ouvert en son centre par une cour d’honneur.

Aujourd’hui, la cour est entièrement couverte au rez-de-chaussée et partiellement à l’étage.

Des espaces vides de chaque côté de la nouvelle construction laissent pénétrer la lumière au travers de vitraux Art nouveau. C’est la seule partie de l’immeuble qui n’est pas bâtie sur des caves.

Définition
Entrée HDG

Entrée de l'Hôtel du Greffe

Une énorme citerne maçonnée a été vidée pour en tenir lieu. À l’origine, la citerne alimentait en eau la cuisine et la cour d’honneur.

Un couloir dallé menait à la cour d’honneur. Aujourd’hui, une transposition moderne toute en pierre bleue meulée et polie remplace les bandes de roulement anciennes ; le losange orné du coq hardi, tel qu’il fut représenté par le peintre Paulus en 1912, marque l’entrée de l’espace construit sur l’ancienne cour d’honneur. Le couloir était orné de deux niches prévues pour des statues ; les niches sont maintenant murées.

La cour était agrémentée de la margelle d’une citerne, à droite, et d’une fontaine lui faisant face, à gauche.

Au-delà de la cour d’honneur, le couloir s’élargissait dans l’aile arrière pour faciliter l’accès aux escaliers menant, à droite vers la première antichambre et à gauche dans le vestibule de l’escalier d’honneur.

Chevaux et cochers rejoignaient la grande cour bordée, d’après les plans, de deux galeries ou d’arceaux de treillage doublant ses murs latéraux. Le fond, traité en faux hémicycle orné d’une niche dans l’axe de l’entrée, dissimulait l’irrégularité du terrain et l’accès vers les écuries et vers l’impasse de la rue de Louvain.

La symétrie du plan n’était pas seulement l’effet d’une mode, c’était aussi le moyen de distribuer sous une seule façade deux Hôtels plus petits avec un accès commun.

Le rez-de-chaussée était réservé aux pièces de fonction dont les deux grandes pièces en façade devaient être un bureau ou un salon et une salle à manger située au-dessus des cuisines. La décoration actuelle de cette pièce, dite salle Maurice Grevisse (anciennement salle bleue) a été restaurée en 1991 et récemment rafraîchie.

Quittons le rez-de-chaussée par le vaste hall toujours dallé de carreaux de marbre noir et blanc. L’escalier d’honneur entièrement en bois, remplacé depuis lors presque à l’identique, était éclairé par deux fenêtres au rez-de-chaussée.

Définition

Le petit office dans lequel aboutissait l’escalier de service donnait directement accès à la chambre de Monsieur, à la salle à manger (la porte est aujourd’hui murée) et à la pièce principale en façade, décrite par Nicole comme « un salon de compagnie adjacent, avec ses trois miroirs, l’un en face de la cheminée, les deux autres en face des fenêtres donnant sur le parc ».

Ce salon de compagnie est actuellement le bureau de la Présidence. Son parquet en marqueterie, qui est postérieur à l’incendie de 1830, est remarquable – il a été restauré en 1990 –. La Belgique était connue pour la qualité de ses parquets depuis l’exposition universelle de Londres en 1851. Celui-ci a été probablement livré par Couvert et Dekeyn.

Les pièces voisines avec balcon en façade formaient la charnière entre les deux parties de l’habitation dont la partie droite était réservée aux pièces de réception privée et la partie gauche aux appartements privés. Les trois pièces en façade sont devenues les bureaux du Secrétaire général du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Définition
Escalier d'honneur HDG 5 - crédit Reporters

À l’origine, la pièce centrale avec balcon était le cabinet de toilette de la maîtresse de maison, dont « la vue doit être agréable et qui doit être bien éclairé », comme le précise l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert dans la définition même du cabinet de toilette.

Entre cette pièce centrale et la chambre de Lady Torrington se situait le boudoir, « un petit cabinet à cheminée, près de la chambre à coucher et du cabinet de toilette » : le plan de Dewez correspond exactement à cette définition. Il s’y trouvait beaucoup de miroirs même aux ébrasements de la fenêtre, indique Nicole.

Lady Torrington disposait de l’appartement complet donnant sur le parc, avec salon, chambre à coucher (diagonalement opposée à celle de Monsieur comme le voulait la coutume au XVIIIe siècle), boudoir, cabinet de toilette et « chambre de bain », citée par Nicole dans ses bordereaux de fourniture de miroirs.

Au deuxième étage, dans l’attique, on trouvait « le salon des Demoiselles aînées » et un autre salon réservé à lady Torrington (au-dessus de sa chambre), outre de nombreuses chambres à coucher pour les membres de la famille et les hôtes.

La partie mitoyenne de gauche est à peine esquissée dans les plans originaux. S’agissait-il de lingeries et de garde-robes ou de pièces qui pouvaient agrandir la maison voisine ? Les deux hypothèses sont plausibles. La distribution actuelle a complètement modifié les aménagements tant de l’Hôtel Torrington que du petit Hôtel voisin, dit d’Aguilar, dont il ne reste d’original que le passage carrossable.

Les combles étaient généralement partagés en mansardes réservées au logement des domestiques, à un grenier et parfois à une pièce pour le repassage et la couture. Une buanderie alimentée en eau grâce à un réservoir qui récupérait les eaux pluviales a existé dans d’autres habitations conçues par Dewez. Les domestiques circulaient par quelques couloirs, par des pièces de service et par de petites cages d’escalier.

Définition

Au premier étage, le large palier, doublement éclairé par deux fenêtres – l’une donnant sur la cour d’honneur, l’autre sur la grande cour – précédait la première antichambre surplombant le couloir entre les deux cours, suivie d’une seconde antichambre donnant accès à deux pièces privées. Cette seconde antichambre a pu servir, pure hypothèse, de bureau ou de salon.

Pénétrons plus avant dans l’espace de la vie privée, en nous fondant, pour déterminer la destination de certaines pièces du premier étage, sur la facture et les bordereaux de livraisons d’un « Nicole », fournisseur de miroirs en 1785, et en interprétant le vocabulaire figurant sur les plans de Laurent-Benoît Dewez d’après l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert.

Il n’y a quasiment pas de couloirs dans la maison, ce qui explique les doubles issues de toutes les pièces importantes.

Les deux pièces auxquelles la seconde antichambre donnait accès étaient, d’après nos suppositions, la salle à manger et « la chambre de lord Torrigton ».

Définition
Couloir 1er étage de l'Hôtel de Ligne

1er étage de l'Hôtel du Greffe

« Une salle à manger munie d’une cheminée surmontée d’un miroir en trois pièces », indique Nicole. C’était vraisemblablement la pièce avec vue sur la cour d’honneur et sa fontaine, à deux étages au-dessus des cuisines installées en sous-sol. Le service montait les plats couverts d’une cloche en argenterie permettant de les garder chauds par un petit escalier qui aboutissait dans un office. L’éloignement des cuisines était voulu par souci de discrétion...

« La chambre de lord Torrington », dans l’enfilade des deux antichambres, avec vue sur la grande cour a doublé de surface en empiétant sur le premier étage de l’Hôtel Verseyde. Sa décoration et son mobilier de style éclectique situent la transformation à la fin du XIXe siècle. Elle est aujourd’hui la salle des gouverneurs.

Définition

Les aménagements contemporains

Rénovation de l’entrée par le bureau d’architectes Coton – Lelion

Le travail des architectes Coton et Lelion au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles se distingue par une volonté de se mettre au service du lieu et de l’œuvre. De l’esprit néo-classique du bâtiment d’origine, ils retiennent l’unité et l’équilibre. L’apport de Coton-Lelion vise avant tout à offrir à la salle d’attente la quiétude qu’elle réclame, tout en favorisant la contemplation induite par l’installation de Jacques Charlier. Dans cette pièce, l’intervention des architectes est minimale. L’idée principale est de revenir à l’essence du lieu. Les ajouts inutiles sont supprimés au profit de la valorisation des éléments anciens : le parquet en chêne à bâtons-rompus (en chevrons), les appliques et le lustre dorés, ainsi que la cheminée en marbre dont le bouton du manteau sert d’inspiration pour la création d’une nouvelle frise murale. Ce procédé classique de la répétition d’un motif décoratif est inspiré du principe mis en œuvre dans la salle de réunion adjacente. Si la symétrie absolue n’est pas recherchée, une nouvelle porte imitant ses voisines est placée en regard de celle située dans l’axe de l’entrée. Vitrées, ces deux portes permettent de voir l’œuvre de Charlier.

Pour valoriser l’espace où s’intègre La doublure du monde, la réorganisation complète des circulations s’avère nécessaire. Dans le hall d’accueil, le comptoir des huissiers est repositionné pour faciliter les flux. Davantage visible depuis le porche, il devient un appel pour le visiteur. En supprimant une réserve et en affinant un mur heureusement épais, le couloir en cul-de-sac situé à gauche de la pièce centrale est percé pour concentrer les déplacements entre le sas, l’ascenseur et la cour, où une nouvelle rampe d’accès facilite les livraisons.

Définition
Travaux rénovation rdc HGD - accueil - crédit J_Charlier

Hall d'accueil de l'Hôtel du Greffe

Dans cet espace de dégagement au volume peu conventionnel, les irrégularités sont soulignées plutôt que dissimulées par une décoration qui reprend le motif du bouton de la cheminée de la salle d’attente. Agrandi et reproduit sous forme d’éléments préfabriqués en plâtre renforcé, il recouvre entièrement un pan de mur en biais et un plafond étonnamment bas pour s’adapter aux contraintes techniques.

Le jeu sur la répétition rejoint l’œuvre symbolique de Charlier et sert de fil rouge à l’ensemble des interventions contemporaines, à la fois clairement identifiables et suffisamment discrètes pour ne pas concurrencer le bâtiment ancien. Dans tous les lieux de passage, le sol se singularise par un calepinage complexe, qui recouvre également le bureau d’accueil rectangulaire : source de luminosité, les carreaux de marbre blanc bordés d’une pièce de pierre bleue sont placés en léger retrait les uns par rapport aux autres pour créer une oblique brisée d’un grand dynamisme. La combinaison d’un matériau traditionnel et d’une mise en œuvre originale accentue le caractère prestigieux du lieu.

La sobriété de la palette relève d’un même esprit : le blanc domine, rehaussé de touches de noir et d’or. Seul le meuble en bois aux lignes épurées dessiné pour s’adapter à l’espace face à l’ascenseur se distingue par un rouge brillant.

Jouant subtilement sur l’ambiguïté entre l’ancien et le nouveau, la simplicité et la sophistication, l’intervention architecturale de Gauthier Coton et Xavier Lelion est une invitation à aiguiser notre regard.

Définition

Les œuvres d'art contemporain

Le Parlement a décidé, outre les dépôts d’œuvres d’art du service des arts plastiques du Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de constituer, certes modestement et progressivement, une collection d’œuvres d’art.

En cohérence avec les compétences culturelles qui ont été confiées à ce que l’on nommait alors la Communauté française, soucieux de promouvoir les talents artistiques qui foisonnent tant en Wallonie qu’à Bruxelles, le Parlement, conseillé par un comité d’experts a entamé ses acquisitions à la faveur de son installation à l’Hôtel de Ligne.

Les œuvres intégrées constituent une partie de cette collection, elles correspondent à un projet qui se construit sur une longue période tandis que l’achat d’une œuvre existante peut parfois être plus rapidement mis en oeuvre, même si chaque fois, une réflexion est menée sur son intégration dans un lieu qui la mette en valeur.

Découvrons les œuvres qui appartiennent à notre Parlement se trouvant à l'Hôtel du Greffe.

Définition